26 avril 2009

Microfictions de Régis Jauffret

1000 pages. 500 histoires sur deux pages, chaque hsitoire racontée par un de ses protagonistes. Vision clinique, quasi statistique d'un monde en perdition. Vies solitaires, tentations autodestructrices, inceste, violences, folie. Misère économique, sexuelle.
Le tableau teinté d'humour noir que dresse Régis Jauffret de notre humanité n'est pas des plus réjouissants. Impressionnisme littéraire, portrait du tout par petites touches, accumulation. Apparitions furtives de l'auteur lui-même qui dresse de sa personne un portrait au vitriol.
Un livre magistral, qu'il est nécessaire de lire d'un bout à l'autre, d'"Albert Londres" à "Zoo" pour que le tableau soit complet, s'achevant d'ailleurs par l'une des apparitions de Jauffret lui-même :
"Je suis l'auteur de Microfictions ! Un livre qui d'après mon amie était passé directement de l'imprimerie au pilon."
Exorcisme, superstition : le livre est vivant, il est un cri d'une violence inouïe, violence qu'avaient pu approcher les heureux spectateurs de la lecture publique de Microfictions donnée au Théâtre du Rond Point lors de la dernière Nuit Blanche à Paris. Lors de cette nuit, de nombreux acteurs s'étaient relayés sur scène avec l'apparition furtive de Jauffret lui-même dont la lecture avait été d'une nature complètement différente, sans aucune trace d'humour, sans second degré, dans une urgence, un désespoir stupéfiants .

A lire.

Le Littérroriste.



19 avril 2009

Tokyo Sonata

Le film de Kiyoshi Kurosawa met en scène une famille japonaise d'aujourd'hui. Lui a un emploi dans le tertiaire, elle reste à la maison. L'aîné des deux fils poursuit ses études et distribue des tracts pour se faire de l'argent de poche. Le benjamin est au collège ou son franc-parler lui pose des problèmes.
Famille qui semble fonctionner, avec les non-dits de toute famille du monde dit développé.
Rapidement, les choses éclatent. Le père est subitement licencié, et continue à faire semblant de se rendre au boulot tous les matins. Le plus jeune des fils détourne l'argent de la cantine et prend en secret des cours de piano auprès d'une voisine. L'aîné s'engage dans l'armée aux côté des américains et part en Irak. La communication s'est peu à peu perdue. Elle reposait sur des implicites, des choses qui, devant aller de soi, ne sont plus discutées. Quand la situation change, le silence reste, mais dissimule alors des mensonges par omission.

Portrait réaliste d'un Japon qui nous ressemble. La mère de famille suit un cambrioleur, quitte son foyer pour vivre quelques jours auprès d'un autre exclu qui finit par précipiter sa décapotable volée dans l'océan.

Retour au bercail, retrouvailles en silence. Séquence finale : le jeune pianiste passe une audition pour une école de piano prestigieuse. La transgression (la sienne, celle de la mère qui a fauté) et l'humiliation (le père renvoyé, forcé de travailler à l'entretien d'un centre commercial) sont intégrés, la vie peut recommencer.

Beau film sur l'absurdité du monde que nous nous sommes créés, sa violence cachée.

Le Littérroriste