19 août 2007

Le monde du blues

Même pour le passionné de blues, il peut paraitre difficile de rentrer dans cet ouvrage. Paul Oliver y retrace l'existence, pour ne pas dire l'histoire, des noirs américains, illustrant ses propos des textes de chansons enregistrées. Il faut donc avaler ce livre sans trop d'arrêts, laisser l'histoire nous submerger, assister à la révélation d'atrocités (le Klan) , d'anecdotes... Le livre est écrit au début des années soixante, alors que les noirs américains, théoriquement libres, vivent une situation d'apartheid, que le free jazz entame la révolte, et que Martin Luther King prêche la résistance non-violente. D'histoires de bordels à la vie en prison, de femmes infidèles aux joueurs de cartes, on assiste au passage d'une société rurale (le Sud) à une société urbaine.
Le monde du blues est un livre majeur, sans aucun angélisme - il n'y a pas les gentils noirs et les méchants blancs -, mais parfois entaché des préjugés de son époque. L'homosexualité y est ainsi décrite comme un vice d'une gravité extrême, ce qui, rétrospectivement, nous montre le chemin parcouru et signale comment le victimisme de certaines minorités actuelles est proche du ridicule.

On peut regretter qu'il n'y ait pas (à ma connaissance) d'édition de l'ouvrage accompagnée d'un CD des blues cités, ce qui permettrait d'entreprendre ce long voyage en musique.

BI

15 août 2007

Qui connaît Madame Royal ?

Eric Besson, économiste socialiste chargé du chiffrage du programme de la candidate, a quitté le navire avant qu'il ne sombre, dénonçant l'incompétence, la démagogie et l'autoritarisme de celle qui se voyait comme la mère de tous les français (j'ai déjà glosé sur ce vocabulaire néo-pétainiste).

Le livre publié par le Seuil regroupe des entretiens avec Claude Askolovitch (Nouvels Obs), qu'on ne peut pas taxer d'anti-socialisme primaire.

Nous sommes quelques-uns à avoir échappé in extremis au vote Royal, à avoir ressenti un vrai malaise devant une candidate dont nous soupçonnions qu'elle était tout autre chose que ce qu'elle voulait nous présenter.

Besson nous révèle l'ampleur du malaise au sein du PS. Il parle finalement moins de Royal que du clivage entre son équipe et le reste du Parti Socialiste. Entre la figure d'un Hollande incapable de trancher, les vieux amis qui poignardent Besson dans le dos, les mensonges à répétition de la candidate, ses bourdes révélatrices, l'entretien complète utilement La femme fatale que nous avons chroniqué ici.

Dans Qui connaît Madame Royal ? Besson met spécifiquement l'accent sur la prétention participationniste de Royal, et la manière dont tout cela n'a servi qu'à justifier un discours pré-établi. Besson finira par démissionner, songera à se retirer pour toujours de la politique, avant d'être accueilli par le camp d'en face, comme beaucoup d'autres.
Jamais candidat socialiste n'aura suscité une telle désaffection des intellectuels, dans un pays où, pourtant, ne pas être de gauche est considéré comme un manque de gout lorsque l'on paye l'ISF.

BI

ps: vidéo de Besson sur son livre

06 août 2007

Sweet sixteen

Sweet sixteen est un parcours sonore. Vous embarquez au palais de Tokyo, muni de vos écouteurs, pour un voyage à travers le XVIème arrondissement (image) contredit par une succession de fragments sonores (bande son) issus du XVIIIème arrondissement. Les enregistrements sont nés d'ateliers réunissant des jeunes des quartiers de la Goutte d'Or et de la Chapelle. Ca pourrait être intéressant, malgré le parti-pris un peu...cliché (ah comme ces quartiers chics sont morts, écoutez comme les quartiers populaires sont vivants!), mais ça ne marche pas très bien. Pourquoi ? Tout d'abord les fragments sonores ne sont pas d'une grande originalité : interviews d'habitants, thématiques rebattues, raps communs se succèdent le long d'un parcours trop long. Ensuite et surtout parce que le procédé n'est pas poussé à fond, que le contraste n'est pas assez fort, pas assez caricaturé. Le lien entre le parcours et le son est plutôt ténu, les lieux visités n'ont pas grand-intérêt et n'entrent pas en résonance avec le son. On en sort un peu déçu, déçu de tant de conformisme dans un domaine où l'imaginaire a souvent été convoqué avec succès par des artisans du son comme Pierre Henry.

BI

ps: comment illustrer le son ? Par une photo prise le long de l'itinéraire, à défaut de mieux.

02 août 2007

A la cadence de l'herbe

Thomas Mc Guane est un auteur rare. Finies les collaborations avec le cinéma, il vit aujourd'hui retiré dans son ranch au milieu des chevaux et des vaches. L'alter-ego de Jim Harrison a toujours ce talent pour décrire la dérive de ses personnages, leurs incertitudes, leurs contradictions. La fin d'une époque et de ses valeurs (les pionniers, les ranches...) , la montée des flux financiers... les usines ferment, les couples explosent, les secrets de famille se révèlent.
L'auteur de Panama sait mieux que quiconque ce qui se cache derrière les mythes, de quoi sont faits les hommes.

Un grand livre

BI