15 juillet 2007

L'avocat de la terreur

Le documentaire de Barbet Schröder a l'intelligence de nous amener aux conclusions qui s'imposent sans forcer. La forme filmique qu'est le documentaire ne peut, on le sait, accéder à une quelconque prétention d'objectivité. Le choix des plans, des archives, l'ordre des séquences, leur découpage, les focales, l'absence ou la présence de voix off... tout cela façonne une vision personnelle. Mais ce qui fait la force du film de Schröder, c'est d'entendre les protagonistes de l'histoire de Jacques Vergès s'exprimer directement, expliciter les liens qui unissaient l'avocat à l'extrème gauche pro-palestinienne comme à l'extrème droite suisse. On connaissait la tradition antisémite de l'extrème gauche française, le film nous apprend comment les nazis européens et les gauchistes allemands ont collaboré dans les années 70, comment ce beau monde a combattu Israël, encouragé le terrorisme "de libération" arabe. On entend, interloqué, Vergès justifier les attentats au nom de la guerre, confondant sans doute les agresseurs. Extension de la lutte au monde entier, délire paranoïaque d'un enfant de la colonisation pour qui il faudra lutter et tuer tant que les crimes coloniaux ne seront pas reconnus. Tuer à l'autre bout du monde : nous contre tous, ils sont tous coupables... Autres temps: procès Barbie: la défense de l'accusé est financée par un ami nazi suisse. Au final, seuls quelques terroristes repentis sont lucides sur ce qu'a été cette période. Les intellectuels de gauche français (et notamment les maos et l'entourage de Sartre) n'ont visiblement pas fait leur mea culpa, (y compris celui qui a joué un rôle dans mon parcours universitaire NDLR), parlent avec détachement et humour de Vergès et de ses dérives.
Un document exceptionnel, à voir d'urgence.

BI